Les carcinomes cutanés
Les carcinomes ou épithéliomas sont des tumeurs malignes fréquentes qui se voient principalement chez les sujets de plus de 40 ans. Ils sont plus souvent observés chez les gens au teint clair et prédominent sur les régions exposées au soleil.
La relative facilité de leur traitement doit inciter à faire le diagnostic à un stade de début de façon à concilier la sécurité du résultat carcinologique et l’aspect esthétique.
De janvier 1984 à décembre 1993, 2114 patients présentant 2448 épithéliomas cutanés ont été opérés. Dans 2/3 des cas il s’agissait d’épithélioma basocellulaire et dans le 1/3 restant d’épithélioma spinocellulaire. 89 % des lésions siégeaient sur l’extrémité céphalique, 8% sur les membres et 3 % sur le tronc. Plus de 90 % sont d’origine rurale et 1410 sont des hommes pour 704 femmes.
Facteurs prédisposants et lésions précancéreuses
· Les kératoses actiniques : le rapport entre les épithéliomas cutanés et l’action de la lumière et les rayons UV est connu depuis longtemps. Il y a une relation de proportionnalité entre la dose totale de rayons UV reçus et l’incidence des cancers cutanés non mélaniques .Une augmentation de 1% de la dose d’UV reçue par la peu entraîne une augmentation de 3% du taux de cancers cutanés et une réduction de 1% de la couche d’ozone provoquerait une augmentation de 5%.
· Les kératoses séniles : Elles se voient chez le sujet âgé et sur les parties exposées à la lumière. La forme papillomateuse peut donner naissance à des cancers basocellulaires. La forme ulcérée peut évoluer quant à elle aussi bien vers la forme spinocellulaire que basocellulaire.
· Les kératoses chimiques :
o Kératoses arsenicales : intoxication professionnelle.
o Kératoses du goudron : Au Maghreb le goudron végétal (Gatrane) est utilisé comme thérapeutique traditionnelle pour des affections de la peau (pyodermite, eczéma, ulcérations) .Ces lésions subissent pendant des semaines, voire des mois des applications de Gatrane alternées d’attouchement à la pierre de lune (sulfate de cuivre) ce qui risque d’entraîner des épithéliomas quasi-expérimentaux.
· Les radiodermites professionnelles : des cancers cutanés, surtout au niveau des doigts, sont observés dans le domaine médical, chez les personnes qui manipulent imprudemment les rayons X.
· Les séquelles de brûlures : la survenue 10 à 30 ans après une brûlure cutanée d’un épithélioma spinocellulaire est une notion classique.
· Les états cicatriciels chroniques post-traumatiques : les traumatismes uniques et répétés peuvent favoriser l’apparition de cancers cutanés (microtraumatisme répété, branche de lunettes).
· Les dermatoses inflammatoires :
o Le lupus tuberculeux ancien cicatriciel ;
o L’ostéomyélite chronique et la tuberculose ostéo-articulaire fistulisée à la peau.
· Les processus ulcéreux chroniques tel que les ulcères de jambe peuvent aussi se cancériser.
· Les dermatoses précancéreuses :
o Le xéroderma pigmentosum, affection génétique, fréquente dans nos contrées évolue vers des lésions atrophiques puis néoplasiques.
o L’albinisme oculo-cutané : Cette affection qui touche le système mélanocytaire de l’épiderme des follicules pileux et de l’œil est également associée à la survenue d’épithélioma multiple spinocellulaire.
o Les naevi et neavomatose basocellulaire se transforme généralement en épithélioma basocellulaire.
o La maladie de Bowen a un potentiel de transformation en épithélioma spinocellulaire.
Aspects évolutifs
· Les épithéliomas basocellulaires : début insidieux, lésion au début indolore ce qui fait retarder la consultation. Dans la série du service de Douéra, près de la moitié des lésions avaient un diamètre de plus de 3 cm. Tendance à la récidive locale.
· Les épithéliomas spinocellulaires : début la lésion cutanée évolue plus rapidement, alarmant le patient qui consulte relativement dans des délais plus courts. Envahissement progressif des parties molles, des vaisseaux et des nerfs ainsi que des massifs osseux .C’est un cancer très lymphophile.
Aspects thérapeutiques
Devant un épithélioma cutané, deux options thérapeutiques peuvent être envisagées dont le but est d’assurer la destruction carcinologique avec le minimum de séquelles fonctionnelles :
· Les méthodes non chirurgicales :
o La chimiothérapie locale
o L’électrocoagulation
o La photocoagulation au laser
o La cryochirurgie
o La radiothérapie
Ces techniques sont efficaces, évitant l’anesthésie générale mais elle ne permettent pas un contrôle anatomopathologique tout a fait complet de la lésion.
· Les méthodes chirurgicales : La chirurgie permet l’exérèse complète du tissu tumoral et l’examen anatomopathologique de la lésion permettant d’attester de la qualité de cette exérèse. Le traitement doit être envisagé sous un double aspect : carcinologique d’abord, esthétique et fonctionnel ensuite.
Les cancers cutanés doivent interpeller l’ensemble des médecins qui doivent y penser devant toute lésion cutanée qui n’a pas fait la preuve histologique de sa bénignité. C’est en prenant en charge le plus tôt possible ces lésions qu’on espérera un traitement adéquat avec des résultats satisfaisants.