Reconstruction mammaire et injection de graisse : quel risque pour le sein ?
La controverse n’est pas absente de la chirurgie plastique et l’un des derniers exemples est celle qui a éclaté en ce qui concerne l’infiltration des seins par du tissu graisseux. Le temps est peut-être venu de prendre un peu de recul et de faire le point.
L’injection de graisse autologue (IGA), c’est à dire prélevée sur les cuisses ou le ventre de la patiente, est largement utilisée au niveau de la face, des fesses, des mains et pour combler les défauts laissés par certaines liposuccions. Son utilisation en chirurgie mammaire soulève plus de réserves, peut-être avec raison. En effet, le sein peut souvent être augmenté de volume ou reconstruit au moyen de prothèses ou de lambeaux. De plus, il faut se souvenir que le sein fait l’objet de dépistages cliniques et radiologiques répétés et que plus d’une femme sur 10 développe au cours de sa vie un cancer du sein (KS). Or l’infiltration de graisse dans le sein a été accusée de simuler, de dissimuler, voire de provoquer le KS.
Actuellement, on reconnaît 5 types d’indications pour l’IGA en matière de reconstruction mammaire :
- complément d’une reconstruction mammaire en corrigeant des irrégularités du profil
- correction d’une asymétrie après chirurgie conservatrice du sein
- augmentation mammaire pour seins jugés trop petits
- camouflage de prothèses après augmentation mammaire
- reconstruction isolée par IGA après mastectomie
Pour chacune de ces indications, il faut évaluer l’efficacité, la sûreté, le coût, le rapport bénéfice/travail, et la responsabilité engagée par le chirurgien.
Les sociétés savantes ont le devoir de prêcher la prudence sans cependant empêcher le progrès, double défi de plus en plus difficile à assumer. La pratique actuelle des chirurgiens plastiques peut changer en quelques mois.
Lors de 2 récents congrès d’Amérique du Nord, un sondage a révélé qu’une large majorité (87 %) des plasticiens utilisaient sans arrière pensée l’IGA dans la reconstruction mammaire, et que 52 % y étaient favorables sous certaines conditions dans l’augmentation mammaire. En attendant d’avoir des preuves plus décisives de l’innocuité de la méthode, il faut garder l’esprit ouvert et curieux et refouler tous nos préjugés.
Références :
Spear Scott L. : Fat for breast : where are we?
Plastic and reconstructive Surgery 2008; 122(3):983-4.